Pouvoirs de la ville. Note sur la pensée urbaine et les langages politiques au début de l’âge moderne


resumo resumo

Romain Descendre



diverses fonctions des groupes sociaux composant la communauté urbaine[1]. Cette idée se traduit chez lui non seulement par la différenciation des types de bâtiments mais aussi par leur séparation en différentes zones urbaines. Planifiée horizontalement selon un schéma concentrique, la ville doit ainsi compartimenter les classes en secteurs bien distincts. Cette redistribution horizontale tend d’une part à refléter et à rationaliser une hiérarchisation sociale particulièrement forte, d’autre part à couper les quartiers d’habitation destinés à une populace identifiée comme une classe éminemment dangereuse des espaces dévolus à un gouvernement exercé par une élite politique que l’on doit donc préserver de la multitude[2]. Mais c’est encore l’édifice, sa fonction spécifique indexée au rôle social de celui qui y réside et y exerce son activité, qui constitue l’unité fondamentale à partir de laquelle est pensée la ville. La ville apparaît comme addition et conglomération de ses parties, plus que comme un tout organique et systémique.

À cet égard, les fragments et croquis de Léonard de Vinci consacrés aux questions urbaines constituent une étape nouvelle et particulièrement novatrice – tant et si bien que certains sont allés jusqu’à faire du célèbre peintre et ingénieur « le premier véritable urbaniste (urban planner) au sens moderne »[3]. Ce jugement se fonde notamment sur un feuillet souvent cité du carnet B, appartenant à la collection des manuscrits léonardiens de l’Institut de France. On y voit, en élévation, un petit morceau de ville présentant des édifices, des espaces publics ou semi-publics et des voies de circulation terrestres et fluviales situés sur deux niveaux distincts [Fig. 2]. La ville apparaît ainsi structurée selon un axe vertical déterminant une hiérarchisation des tâches

L. B. Alberti, op. cit., livre IV, chap. 1, p. 265-271. Sur ces questions, voir A. Tenenti, « Società e ‘De re aedificatoria’ », in Leon Battista Alberti teorico delle arti e gli impegni civili del “De re edificatoria, Atti dei Convegni di Mantova (17-19 ottobre 2002; 23-25 ottobre 2003), a cura di A. Calzona, F. P. Fiore, A. Tenenti, C. Vasoli, Firenze, Olschki, 2007, vol. I, p. 371-378.

L. B. Alberti, op. cit., livre V, chap. 1, p. 335-337.

Pour Luigi Firpo, Léonard fut « undoubtedly the first real urban planner in the modern sense » : L. Firpo, « Leonardo as urban planner », in Leonardo da Vinci Engineer and Architect, exhibition catalogue, ed. by P. Galluzzi and J. Guillaume, Montreal, The Montreal Museum of Fine Arts, 1987, p. 287-301 : 291. Sur Léonard urbaniste, voir aussi C. Pedretti, « Leonardo’s plans for the enlargement of the city of Milan », Raccolta Vinciana, XIX, 1962, p. 137-147 ; L. Firpo, Leonardo architetto e urbanista, Torino, Utet, 1963 ; E. Garin, Rinascite e rivoluzioni. Movimenti culturali dal XIV al XVII secolo, Bari, Laterza, 1975, p. 237-254 ; C. Pedretti, Leonardo architetto, Milano, Electa, 1988 (1ª ed. 1978) ; P. C. Marani, « Leonardo e Leon Battista Alberti », in Leon Battista Alberti, catalogo della mostra di Mantova, a cura di J. Rykwert e A. Engel, Milano, Electa, 1994, p. 358-365 ; P. C. Marani, « Leonardo urbanista e l’antico: riflessioni ed ipotesi », Raccolta Vinciana, XXVI, 1995, p. 3-41 ; M. Versiero, Il dono della libertà e l’ambizione dei tiranni. L’arte della politica nel pensiero di Leonardo da Vinci, Napoli, Istituto italiano per gli studi filosofici, 2012.



[1] L. B. Alberti, op. cit., livre IV, chap. 1, p. 265-271. Sur ces questions, voir A. Tenenti, « Società e ‘De re aedificatoria’ », in Leon Battista Alberti teorico delle arti e gli impegni civili del “De re edificatoria, Atti dei Convegni di Mantova (17-19 ottobre 2002; 23-25 ottobre 2003), a cura di A. Calzona, F. P. Fiore, A. Tenenti, C. Vasoli, Firenze, Olschki, 2007, vol. I, p. 371-378.

[2] L. B. Alberti, op. cit., livre V, chap. 1, p. 335-337.

[3] Pour Luigi Firpo, Léonard fut « undoubtedly the first real urban planner in the modern sense » : L. Firpo, « Leonardo as urban planner », in Leonardo da Vinci Engineer and Architect, exhibition catalogue, ed. by P. Galluzzi and J. Guillaume, Montreal, The Montreal Museum of Fine Arts, 1987, p. 287-301 : 291. Sur Léonard urbaniste, voir aussi C. Pedretti, « Leonardo’s plans for the enlargement of the city of Milan », Raccolta Vinciana, XIX, 1962, p. 137-147 ; L. Firpo, Leonardo architetto e urbanista, Torino, Utet, 1963 ; E. Garin, Rinascite e rivoluzioni. Movimenti culturali dal XIV al XVII secolo, Bari, Laterza, 1975, p. 237-254 ; C. Pedretti, Leonardo architetto, Milano, Electa, 1988 (1ª ed. 1978) ; P. C. Marani, « Leonardo e Leon Battista Alberti », in Leon Battista Alberti, catalogo della mostra di Mantova, a cura di J. Rykwert e A. Engel, Milano, Electa, 1994, p. 358-365 ; P. C. Marani, « Leonardo urbanista e l’antico: riflessioni ed ipotesi », Raccolta Vinciana, XXVI, 1995, p. 3-41 ; M. Versiero, Il dono della libertà e l’ambizione dei tiranni. L’arte della politica nel pensiero di Leonardo da Vinci, Napoli, Istituto italiano per gli studi filosofici, 2012.