Pour une science humaine du discours. Des affects et des vertus dans la science réflexive


resumo resumo

Marie Anne Paveau



propose quant à elle un modèle néo-aristotélicien de l’épistémologie des vertus reposant sur la phronesis comme reliant vertu morale et intellectuelle. L’honnêteté est par exemple pour elle à la fois un vertu morale et une vertu intellectuelle :

 

For example, honesty is on all accounts a moral virtue. It is a virtue that requires that one tells the truth. But it is not sufficient for honesty that a person tell whatever she happens to believe with the truth. An honest person is careful with the truth. She respects it and does her best to find it out, to preserve it, and to communicate it in a way that permits the hearer to believe the truth justifiably and with understanding. But this in turn requires that she have intellectual virtues that give her as high a degree of justification and understanding as possible.  She must be attentive, take the trouble to be thorough and careful in weighing evidence, be intellectually and perceptually acute, especially in important matters, and so on, for all the intellectual virtues. The moral virtue of honesty, then, logically entails intellectual virtues (ZAGZEBSKI 1996, p. 158-159).

 

On peut citer d’autres exemples de vertus éthiques et épistémiques : Pascal Engel et Kevin Mulligan proposent « la modération dans le jugement, la pondération, le scrupule, l’intelligence » ; Linda Zagzebski signale la prudence intellectuelle, la persévérance, l’humilité, la fermeté, la flexibilité, le courage, la clairvoyance, l’ouverture d’esprit, l’élégance d’esprit. L’articulation de l’éthique et de l’épistémique repose sur l’idée que le « knower » est un agent de vertu éthique : les théories de la vertu épistémique sont donc bien « person-based » et non « act-based ».

Avec cette approche éthique de l’épistémique, on est dans le règne des valeurs : il s’agit d’une éthique des valeurs, et non d’une éthique des normes (dont le modèle serait le système kantien). Dans son dernier livre, Épistémologie pour une marquise, Pascal Engel expose clairement les liens entre science et valeur, en insistant sur notre capacité d’apprendre la vertu épistémique, de nous éduquer à la pratique d’une science appuyée sur les valeurs (E. désigne le personnage qui le représente dans le cadre d’un dialogue philosophique avec la marquise) : 

 

E. L’idée qu’il existe des devoirs propres à la vie intellectuelle est banale. Un scientifique a le devoir de vérifier ses données, un journaliste celui de s’informer, un professeur celui de connaître son sujet, un étudiant celui d’apprendre, etc. Mais ces obligations ne diffèrent pas des codes de déontologie qui régissent toute profession : dans la mesure où acquérir le savoir, le diffuser et le transmettre sont des activités humaines au service d’un certain but et soumises à certaines règles, ceux qui s’y engagent souscrivent implicitement ou explicitement aux devoirs propres à ces activités et s’exposent à des critiques ou à des sanctions s’ils ne s’y conforment pas. Plus problématique est l’idée selon laquelle les activités cognitives en