leçons de la psychogéographie dans des programmes architecturaux concrets est loin d’être aussi évident qu’on pouvait le penser à l’époque. La vision situationniste de l’architecture en termes de «mégastructures» était d’ordre politique et social plus qu’architectural à proprement parler. Loin de nous l’idée de concevoir l’architecture comme une pratique dépourvue d’enjeux sociaux-politiques. Il nous semble plutôt que cette impasse de l’architecture situationniste provient surtout de la difficulté à penser plus précisément et systématiquement l’efficace affectif et pratique de l’environnement construit, le rapport complexe entre des signaux physiques, des configurations sensibles et des manières d’être ensemble. Pour forcer un peu le trait, nous dirions que les «effets d’atmosphère» invoqués par les situationnistes relèvent davantage d’une pétition de principe que d’une démonstration rigoureuse et avérée. Bref, la conception situationniste des ambiances pêche plus par défaut que par erreur. On ne peut toutefois s’empêcher de reconnaître à ce mouvement des idées tout à fait précurseurs en la matière. Penser l’ambiance en termes de situations, mettre en avant le caractère affectif, unitaire et opératoire de l’ambiance et faire de l’ambiance le lieu de rencontre entre le monde matériel et le monde social constituent des pistes de recherche toujours aussi actuelles.
L’ambiance comme champ de connaissance
Venons en maintenant aux divers champs de connaissance qui se sont saisis de la notion d’ambiance: la sémantique, la psychopathologie et l’esthétique.
Sémantique des ambiances
Au cours des années quarante et cinquante, plusieurs études linguistiques ont tenté de mettre à jour la sémantique du termeambiance. Deux démarches principales ont été utilisées à cet égard: d’une part, une approche étymologique qui vise à identifier l’origine, les conditions d’émergence et les racines possibles du motambiance; d’autre part, une approche comparative qui s’intéresse aux équivalents de ce mot dans d’autres langues ou aux écarts sémantiques de mots voisins en français.
Si l’adjectifambiantapparaît dès le XVIème siècle dans le milieu scientifique et technique, ce n’est que trois siècles plus tard, aux environs de 1890, que le substantifambiancecommence à être employé en français: en 1885 dans un desNouveaux contes cruelsde Villiers de l’Isle-Adam intitulé «L’amour sublime», en 1890 dans leTraité du Narcissed’André Gide. Souvent attribué aux frères Goncourt, le termeambiance